jeudi, octobre 23, 2008

HARRY HOUDINI (1874-1926) ET LE SPIRITUALISME - 2

Le mouvement spiritualiste

Ce mouvement est né au milieu du XIX è siècle, aux Etats-Unis, et la première vague de sa popularité a été à son apogée durant les années 60 à 80. Sa popularité commence à décliner à la fin du XIXème et au début du XXème siècles; mais le mouvement connaîtra une deuxième grande vogue durant et après la Première Guerre Mondiale. On se l’explique aisément : cette guerre fait plus de huit millions de morts (et 6 millions d’invalides), ce terrible tribut de jeunes vies étant payé par des parents, des épouses, des fiancées et des enfants devenus orphelins. Pire : le guerre est suivie de la terrible pandémie de grippe aviaire (communément appelée «grippe espagnole»), qui fait un nombre extraordinairement élevé de victimes entre 1918 et 1919 — les estimations varient entre 20 et plus de 50 millions de morts. Le mouvement spiritualiste, qui offrait le réconfort de penser que ces morts vivaient en quelque sorte toujours, sur un «autre plan», qu’il était possible de communiquer avec eux et que lors de ces communications nos chers disparus venaient nous assurer que tout allait bien, ce mouvement-là apparaissait à beaucoup comme la promesse, tenue, d’une véritable consolation.

Le mouvement avait été lancé en 1848 par les deux sœurs Fox, Margaret (ou Maggie, alors âgée de 15 ans, elle mourra en 1893) et Kate (ou Katie, alors âgée de 12 ans, qui mourra en 1892) à partir du très modeste domicile familial situé à Hydesville, New York, où elles habitaient avec leur mère. Leur histoire commence le 31 mars 1848, alors que les jeunes filles prétendent avoir découvert que si elles frappaient dans leurs mains, des coups étaient frappés en réponse à ces claquements. La nouvelle attire d’abord des amis et des voisins, curieux et bientôt fascinés, puis une foule considérable dès lors qu’on découvre que ces coups peuvent s’interpréter comme désignant des lettres avec lesquelles on peut dialoguer avec l’esprit frappeur!

Une véritable frénésie pour ces coups frappés s’empare alors de l’Europe et des Etats-Unis. Bientôt, le nombre de «médiums» se multiplie en même temps que les effets qu’ils produisent. Une place à part doit être faite aux célèbres frères Davenport, Ira Erastus (1839-1911) et William Henry (1841-1877), nés à Buffalo. On leur doit en effet l’invention du «cabinet», sorte de placard où ils sont sévèrement ligotés par des membres du public et enfermés avec divers instruments de musique. Sitôt refermées les portes du cabinet, des effets se produisent: les instruments de musique jouent, puis des mains spirites paraissent à travers des ouvertures prévues à cette fin. Mais si on ouvre les portes du cabinet, on découvre que les deux frères sont ligotés, exactement comme au début de l’expérience. De l’espèce de confrontation qui s’établit entre un médium, qui produit des effets extraordinaires, et un public, plus ou moins sceptique qui demande, selon les cas, divers degrés de contrôle des conditions dans lesquelles sont produits ces effets avant de les attribuer à des forces surnaturelles, les Frères Davenport ont trouvé le moyen de sortir presque toujours gagnant. Presque, puisque, comme tant d’autres, ils seront surpris à tricher . D’autres passeront aux aveux, comme les sœurs Fox. En 1888, Margaret fait une percutante apparition à New York durant laquelle elle dénonce comme frauduleux le mouvement qu’elle et sa soeur ont lancé. Tout a commencé, expliquent-elle, comme une sorte de plaisanterie faite à leur mère. Les filles avaient découvert qu’elles pouvaient faire craquer leurs orteils et produire ainsi ces mystérieux coups frappés. Elle le pouvait toujours et en fit la démonstration. Les spiritualistes ne tirent évidemment aucun compte de ces confessions, aussitôt mises sur le compte de l’âge et de la maladie.

En attendant, peu à peu, les séances se ritualisent. Le (ou la) médium et ses clients se réunissent dans la pénombre ou dans l’obscurité la plus complète et des phénomènes étranges, attribué aux esprits, ne tardent pas à se produire : des instruments de musique se mettent à jouer seuls; des objets flottent dans les airs; des coups sont frappés; des messages apparaissent spontanément sur des ardoises; des sons étranges sont entendus; le médium semble s’élever dans les airs; des mains spirites apparaissent; des objets, appelés «apports» semblent «téléportés» et sont offerts aux participants; une étrange substance blanche appelée «ectoplasme» émerge du corps des médiums : elle paraît vivante et prend la forme de membres du corps ou de visages. En 1890 est mis sur le marché un dispositif qui permet de soi-même communiquer avec l’esprit de son choix sans l’intermédiaire d’un médium: la planche de Ouija, qui est d’ailleurs toujours disponible en vente.

La popularité du spiritualisme est telle qu’on fonde à Londres, en 1882, à l’instigation de Fellows du Trinity College de Cambridge, la première organisation vouée à l’étude scientifique des phénomènes paranormaux : la Society for Psychical Research (SPR). On y étudie notamment l’hypnose, la perception extrasensorielle, les phénomènes de personnalités multiples, les fantômes, les apparitions et, bien entendu, les médiums .


La deuxième vague du spiritualisme


C’est à ce moment que Houdini va intervenir. Nous l’avions laissé en 1918, cinq ans après la mort de sa mère, qu’il n’a cessé de passionnément chercher à «contacter», sans succès, mais espérant toujours tomber sur le véritable médium, celui ou celle qui n’aurait pas recours à la tricherie. Ce n’est pas facile, C’est qu’on ne trompe évidemment pas facilement Houdini, qui connaît toutes les ficelles du métier et toutes les manières de produire des phénomènes en apparence inexplicables. Passionné non seulement de magie, mais aussi de spiritualisme, il a réuni chez lui la plus importante collection au monde de documents sur ces sujets. Il a même rencontré chez lui, juste avant sa mort, Ira Davenport et appris de sa bouche les secrets du cabinet. Aucun des phénomènes réputés paranormaux ne lui est étranger et il est en mesure de dire comment on peut s’y prendre pour produire chacun d’entre eux.





Une photographie «médiumnique» produite par Houdini, sur laquelle on le voit en compagnie …d’Abraham Lincoln (1809-1865)! Les premières photographies spiritualistes ont été produites par un certain Mumler, de Boston, en 1860. Il fut convaincu de fraude, mais la popularité de telles photographies était toujours grande durant le premier quart du XX ème siècle et cela même si elles sont faciles à produire, soit par double exposition soit par préparation des plaques.

2 commentaires:

Marc-Olivier a dit…

Le livre s'annonce bien intéressant.


Voici deux coquilles qui me sont tombées sous l'oeil :

- Première Guerre Mondiale

- Ce n’est pas facile, C’est qu’on ne trompe évidemment pas [...]

Normand Baillargeon a dit…

Merci, oeil de lynx Marc-Olivier!

Normand